Avant-propos
Cette réflexion autour des touristes me travaillait depuis de nombreux mois. J’avais commencé en aborder une partie dans mon précédent dossier, Blogueur/voyageurs : et si on perdait la tête ?. En effet, depuis que je me suis lancé dans l’aventure du blog de voyages, que j’échange avec d’autres blogueurs-voyageurs sur cette approche du voyage et que je lis des articles autour de ce sujet, un constat me revient sans cesse : le dénigrement des touristes par cette nouvelle communauté de voyage.
Et si, après tout, nous étions tous des touristes ? Et si, en voulant s’opposer à ce « groupe », on ne faisait que renforcer notre appartenance ? Si, finalement, on essayait de se donner bonne conscience pour se mettre des oeillères dans notre passion finalement assez commune ?
Les touristes : analyse d’un stéréotype malmené
Baladez-vous quelque temps sur différents blogs de voyages, dans les groupes et pages Facebook de partages d’articles, de bons plans, de voyages et prenez le temps de lire les commentaires et les discussions, avec recul. Vous ferez le même constat que moi : le touriste n’a pas bonne réputation sur le web des digitals nomads.
Le touriste représente la masse, ceux qu’on veut fuir lorsqu’on part en voyage. Le touriste, c’est celui qui ne connaît rien à la notion de voyage, qui photographie tout ce qu’il voit, qui ne respect pas la culture de l’autre, qui voyage en bus opérateurs de 50 personnes et qui se fait arnaquer à chaque coin de rue. Le touriste, finalement, nous ramène à la réalité : nous sommes en voyage, nous avons payé pour voyager et nous faisons vivre l’économie de notre destination comme des millions d’autres personnes. Les voyageurs préfèrent désormais se nommer backpackers, digitals nomads, aventuriers, voyageurs mais jamais touristes. Après tout, ce n’est pas très valorisant ! Cherchez un blog de voyage populaire comportant le terme de « touriste », vous n’en trouverez que difficilement. Très souvent même, vous verrez des commentaires et des analyses comme » c’est trop touristique », » on nous prend pour des touristes », » c’est un attrape-touriste »… Et je vous évite les articles du « Comment ne pas passer pour un touriste en 10 leçons » qui fleurissent sur les blogs.
Bref, le touriste a désormais la vie dure. Se pose alors la question du « Pourquoi » ?
Comme je vous le disais, le touriste représente à lui seul, tout ce qu’un voyageur souhaite fuir et partager à son entourage et à ses abonnés : le retour à la réalité.
Le touriste te fait comprendre que tu ne vis qu’une expérience de quelques jours voire semaines dans un pays du monde. Comme l’ont fait avant toi des milliers voir des millions de personnes. Ton expérience et ta passion n’ont rien de bien original. Tes photos du Taj Mahal et du Machu Picchu sont celles de milliers d’autres personnes. Cela n’enlève en rien la beauté de ce que tu vois mais tu en perds l’originalité, c’est certain. Même si ton mode de vie est plus ou moins différent, même si tu apprends peut-être plus sur l’autre en restant plus longtemps (et encore…), tu restes un touriste. Désolé de te le dire.
Internet a tué les touristes, vive les internets ?
Internet a révolutionné notre rapport à l’inconnu, à l’absence de connaissances. Désormais, l’information est accessible immédiatement. À l’heure où l’on trouve tout, tout de suite, tout le monde a déjà vu, plus ou moins, tes photos de voyage (ou de touriste). Tout le monde connaît (ou pas!) quelqu’un qui est allé dans ce pays, à visiter cette ville… Avec Internet, chacun peut désormais vivre les voyages fabuleux de l’autre par procuration.
Ce phénomène nous pousse ainsi à la course au plus original, à l’unique, à l’atypique ( je suis quand même bien placé pour en parler non?) et tout cela nous fait perdre, parfois, la notion même du voyage. Pour parler de ce que je connais, le Taj Mahal, rassemble, chaque année 4 millions de touristes. Et c’est justement alors qu’on essayait d’avoir la plus belle photo de l’édifice, celle ou il n’y a pas trop de « touristes » que cette réflexion m’est venu.
Est-ce que cela m’a enlevé la magie du lieu ? Peut-être un peu.
Est-il pour autant banal ? Certainement pas. Il reste aujourd’hui l’un des plus beaux joyaux d’architectures que j’ai eu la chance de voir.
Ce phénomène crée heureusement une conséquence positive : aujourd’hui, plus que jamais, des destinations méconnues sont sous le feu des projecteurs grâce à ces voyageurs en quête d’originalité et d’unique. On ne peut que se réjouir que l’économie mondiale du tourisme profite à de plus en plus de pays. Surtout si cela participe à l’évolution des mentalités sur la réputation que se traînent certains pays depuis plusieurs dizaines d’années.
Il ne faut cependant pas oublier l’essentiel, le plaisir personnel de parcourir le monde. Nous avons tous une manière de voyager différente, c’est certain. Respectons cela. Tant mieux après tout, cela renforce le partage de points de vue sur une destination et sur une culture étrangère. Mais une façon de voyager ne vaux pas mieux qu’une autre.
Nous sommes, après tout, tous des touristes.
Photographies réalisées par Johan.
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